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Absence de visite médicale d’embauche: que risque l’employeur?

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L’employeur a l’obligation de faire passer une visite médicale d’embauche à chaque salarié qu’il embauche, avant la fin de la période d’essai.

L’article R4624-10 alinéa 1er du code du travail précise en effet : « Le salarié bénéficie d’un examen médical avant l’embauche ou au plus tard avant l’expiration de la période d’essai par le médecin du travail ».

Cette obligation s’applique que le salarié soit en CDI ou en CDD.

Pour certains salariés, qui bénéficient d’une surveillance médicale renforcée, cette visite doit avoir lieu avant l’embauche (article R4624-10 alinéa 2).

  • L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat, doit assurer l’effectivité de la visite médicale d’embauche.

Il doit s’assurer que la médecine du travail convoque le salarié à la visite médicale dans le délai prévu par l’article R4624-10 du code du travail, c’est-à-dire « au plus tard avant l’expiration de la période d’essai« 

L’employeur ne peut se contenter d’effectuer la déclaration unique d’embauche en considérant que l’enregistrement de cette déclaration entraîne automatiquement avis transmis à la médecine du travail (Cour de cassation, chambre sociale, 18 décembre 2013, n°de pourvoi 12-15454).

De même, il ne peut invoquer la carence de la médecine du travail pour se prétendre libéré de son obligation (Cour de cassation, chambre sociale, 28 mars 2001, n°99-41626).

L’employeur pourra en revanche agir contre le service de santé au travail si celui-ci a commis une faute en n’organisant pas la visite médicale (Cour de cassation, chambre sociale 31 mai 2012 n°11-10958).

Mais l’employeur devra justifier avoir pris l’initiative d’organiser la visite médicale obligatoire.

Il doit par conséquent solliciter la médecine du travail afin que la visite médicale soit effectuée au plus tard avant l’expiration de la période d’essai. Il est recommandé  d’adresser dès que possible une demande à la médecine du travail,  et de procéder à des relances si la visite n’est pas organisée rapidement; ces demandes seront effectuées de préférence par écrit, afin de se ménager la preuve des diligences effectuées par l’employeur.

  • Que risque l’employeur qui n’organise pas la visite d’embauche ?

Le fait de ne pas organiser la visite médicale d’embauche constitue un manquement qui cause nécessairement un préjudice au salarié (Cour de cassation chambre sociale, 5 octobre 2010, n°de pourvoi 09-4091317 octobre 2012, n°de pourvoi 10-14248 (pour l’absence de visite médicale d’embauche d’un jardinier, employé de maison, lequel s’est vu allouer une indemnité de 200 euros à titre de dommages-intérêts); (Cour de cassation, chambre sociale, 18 décembre 2013, n°de pourvoi 12-15454 24 juin 2015, n°de pourvoi 14-10227 et 14-10500).

Le montant des dommages-intérêts qui sont alloués aux salariés dépasse rarement quelques milliers d’euros.

Ainsi, dans une décision du 17 novembre dernier, la  Cour de cassation a approuvé une Cour d’appel d’avoir condamné l’employeur à verser 1 500 euros à un salarié en réparation du préjudice lié à l’absence de visite médicale de reprise après un arrêt de travail  (Cour de cassation, chambre sociale, 17 novembre 2015, n°de pourvoi 14-15584).

Dans un arrêt du 15 février 2011, un salarié s’est vu allouer 500 euros de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale d’embauche (il sollicitait initialement une indemnité de 2 000 euros) (Cour d’appel d’Angers, chambre sociale, 15 février 2011, n° RG 10/00585).

Il a en revanche été jugé qu’un simple retard dans la mise en œuvre de la visite médicale d’embauche ne cause pas de préjudice au salarié, lequel est débouté de sa demande de dommages-intérêts qui s’élevait à 2 000 euros (Cour d’appel de Versailles , 15ème chambre, 16 février 2011 – n°RG 10/01154).

Lorsque l’employeur n’a pas organisé la visite d’embauche, le salarié peut-il invoquer cette faute pour rompre son contrat de travail ?

Cela a été jugé dans des situations où l’employeur n’avait pas organisé la visite d’embauche, mais également les visites périodiques ainsi que les visites de reprise après maladie ou accident du travail ce qui constituait un manquement grave de l’employeur, pouvant justifier une prise d’acte du salarié (Cour de cassation, chambre sociale, 22 septembre 2011 n°10-13568 – aucune visite médicale à l’embauche et après un accident du travail); ou dans une situation où un salarié avait repris son travail après un arrêt maladie de plus d’un mois, sans bénéficier d’une visite de reprise (Cour de cassation, chambre sociale, 6 octobre 2010, n°09-66140).

Mais lorsque seule la visite d’embauche n’a pas été organisée par simple négligence de l’employeur, la sanction consiste de manière générale en une condamnation de celui-ci à verser des dommages-intérêts au salarié.

Dans une décision du 18 février 2015,  il a ainsi été jugé que « le manquement de l’employeur, qui ne résultait pas d’un refus mais d’une simple négligence, n’avait pas empêché la poursuite du contrat de travail » ; par conséquent , le salarié ne pouvait se prévaloir d’une faute grave de l’employeur justifiant une prise d’acte (Cour de cassation, chambre sociale, 18 février 2015, n°13-21804).

  • S’il n’organise pas la visite médicale d’embauche, l’employeur s’expose à des sanctions pénales.

Les infractions aux règles relatives à la médecine du travail sont punies de l’amende prévue pour les contraventions de 5ème classe, c’est-à-dire 1 500 euros au plus (article R4745-1 du code du travail). En cas de récidive dans le délai de trois ans, l’employeur encourt une amende de 3 750 euros et une peine d’emprisonnement de 4 mois (article L4745-1 et article R4745-1 du code du travail).

Le tribunal peut par ailleurs ordonner, à titre de peine complémentaire, l’affichage du jugement aux portes de l’établissement  de la personne condamnée et son insertion, intégrale ou par extraits, dans les journaux qu’elle désigne, le tout à ses frais (article L4745-1).

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L’auteure de cet article

Cet article a été rédigé par Maître Nathalie Lailler, avocate spécialiste en droit du travail, de la sécurité sociale et de la protection sociale.

Si vous souhaitez une réponse documentée ou un conseil, vous pouvez demander une consultation en ligne avec Maître Lailler ici.

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